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Une Nuit Arverne haute en couleurs...

Samedi 4 décembre 2010 s'est tenue la célèbre Nuit arverne, dans les salons de l'hôtel Mariott. Quelques quatre-cent soixante-dix convives au banquet et quelques deux-cents personnes à la soirée "jeunes" s'étaient donnés rendez-vous pour saluer les 30 ans de présidence de Raymond Trébuchon. Cette année était en effet particulière pour deux raisons. La première est qu'il n'y avait que quatre candidates pastourelles sur sept départements : Hélène Habert pour la Corrèze, Mélody Pomier pour la Haute-Loire, Aurélie Rousset pour la Lozère et Eléonore Guittard pour le Puy-de-Dôme, l'Aveyron et le Cantal étant les grands absents de cette compétition. La deuxième est que M. Trébuchon saluait le mouvement après trente années de loyaux et dévoués services.


Cette Nuit arverne aurait donc pu être bien triste, mais les Auvergnats savent faire la fête quand ils se retrouvent, surtout quand il s'agit d'honorer un des leurs. C'est déjà ce que notait Jean Ajalbert dans un article d'un supplément littéraire du 25 octobre 1890 du Figaro dédié aux Auvergnats de Paris :
"La Ligue auvergnate comprend des milliers d'adhérents et, chose curieuse, sur quoi insistait l'un de ses membres qui m'en expliquait le but, elle est peut-être la seule des sociétés de ce genre qui ne soit pas une société de secours mutuels et de bienfaisance : "ni malades, ni pauvres chez nos Auvergnats", me disait-il avec un juste orgueil.

"Ce qu'il faut, c'est se serrer les coudes. Notre Société est plutôt une Société de défense, de protection elle est le trait d'union entre les divers syndicats presque exclusivement composés d'Auvergnats ; c'est comme un libre Parlement des émigrants, qui peut leur rendre de grands services. Au point de vue politique, dans toutes les questions intéressant les Auvergnats, nous communiquons avec le gouvernement par les députés de notre région, qui ne peuvent se dérober ; les membres de la Ligue sont là pour les harceler. Au point de vue judiciaire, nous pouvons agir rapidement par des avocats attitrés,
des compatriotes dévoués, pleins de talent, comme M. Aliès et M. Puech. Mais la Ligue Auvergnate n'est pas seulement une association d'intérêts, une Ligue purement pratique. Ses habiles fondateurs ont pensé aussi qu'il y avait temps pour rire, chanter et danser. Des fêtes mémorables ont eu lieu d'autres se préparent ; des banquets de la Ligue ont réuni jusqu'à quinze cents personnes, hommes et femmes, quoique tous Auvergnats. (…)"

Ainsi, la soirée débuta par un apéritif chaleureux, avant que les convives s'installent à leur table pour regarder la première partie du spectacle folklorique donné par des couples des différents groupes, suivi de l'entrée officielle des pastourelles sortantes qui précédaient les quatre candidates. Vint le moment des discours. M. Trébuchon salua M. Patrick Ollier, Ministre Chargé des Relations avec le Parlement, et loua sa présence avant d'appeler Sandrine Mouret, pastourelle de l'Aveyron et pastourelle de la Ligue auvergnate et du Massif Central 2010, pour lui offrir le cadeau de fin de règne et pour lui permettre de remercier tous ceux qui l'ont suivie, invitée et accueillie dans les banquets et sorties cette année. Son sourire et ses propos témoignant de son bonheur pendant l'année écoulée réjouirent l'assemblée.

Puis ce fut au tour des 21 pastourelles de la Ligue élues sous le règne de M. Trébuchon et invitées à la soirée de faire leur apparition; ce fut un grand moment d'émotion, un feu d'artifice de couleurs : la plupart d'entre elles avaient revêtu leur costume et certaines s'étaient munies de leur houlette. C'est un mélange de fierté et de tendresse qui me saisit de nous voir ainsi toutes réunies en ce grand soir autour de cet homme si respectable. Celui-ci fit alors une synthèse de sa présidence, en soulignant ses points forts, notamment comment il a redressé les comptes de la Ligue avec l'aide du Crédit agricole, créé les filiales et en rappelant ses trois objectifs maintenir l'unité entre les sept départements, le maintien de nos traditions et faire rayonner la Ligue, notamment par le prestige de la Nuit Arverne et du Prix Arverne (Prix littéraire).


Il a ensuite appelé les membres de son bureau qui l'ont épaulé tout au long de ces années pour les remercier. Après une standing-ovation qui couronna ce discours, le président d'honneur fit l'éloge de M. Trébuchon et de nos attaches à nos racines, insistant sur la noblesse de notre mouvement comme moyen de promotion de nos terroirs.
Tout au long de la soirée, la musique n'a pas manqué d'entraîner les danseurs sur la piste : l'orchestre de Christian Boissonnade et les musiciens de Cabrettes et Cabrettaïres ont alterné pour varier les plaisirs.

Jean Dongues, l'animateur de la soirée, les interrompit un moment pour présenter les candidates pastourelles en leur demandant quelle était, selon elles, leur principale qualité : Hélène Habert cita l'honnêteté, Mélody Pomier la tolérance, Aurélie Rousset la générosité et Eléonore Guittard la patience. M. Dongues félicita avec raison leur costume, leur prestation et leur aise pour s'exprimer en public: laquelle allait-on élire ? Toutes les pastourelles, anciennes et candidates, se répartirent ensuite les tables pour vendre les billets de la tombola pré-tirée, après quoi Emmanuelle Hermet, pastourelle de la Haute-Loire 2008, et moi-même, offrîmes une surprise musicale à M. Trébuchon : une petite fée nous avait soufflé ses chansons préférées. Emmanuelle interpréta avec chaleur, charme et assurance "Dis, quand reviendras-tu ?" de Barbara et "L'Hymne à l'amour" d'Edith Piaf. J'enchaînai avec "Ma plus belle histoire d'amour, c'est vous" que notre président dédiait à l'assemblée. Enfin, les résultats tant attendus tombèrent. Comme toujours, ils étaient très serrés.

Les classements des notes du jury et des votes du public retinrent tous deux Mélodie Pomier, pastourelle de la Haute-Loire, première. Cette jeune fille de 17ans, au sourire ravageur, aux idées claires (elle est en terminale STG option marketing pour travailler ensuite dans la mode), douée pour la broderie, membre de la Bourrée de Paris, fille et sœur de deux Cabrettaïres hors-paires, est donc notre nouvelle pastourelle de la Ligue.
La soirée se poursuivit avec les traditionnelles photos des pastourelles élues, et en musique, les convives les plus en forme jonglant entre la "soirée jeunes" et le bal du banquet.
La Nuit Arverne 2010 restera donc dans les esprits comme le symbole nostalgique d'un passage entre deux ères pour la Ligue Auvergnate.

Celle-ci aura eu sa grande époque, quand M. Trébuchon et son équipe étaient à sa tête, quand chaque amicale pouvait remplir sa salle de banquet, quand les sept départements avaient au moins une candidate pastourelle pour le représenter. Cette époque s'éteint avec la révérence de M. Trébuchon. Mais l'après est déjà en réflexion, en construction. Si nous n'avons pas le nombre, nous aurons la créativité nécessaire pour perpétuer le mouvement autrement.

Merci Raymond...

Peut-être pouvons-nous relire l'extrait de l'article du Figaro de 1890 pour nous rappeler les fonctions de la Ligue et son poids sur la scène publique, non pas dans l'espoir de reproduire cette situation aujourd'hui, mais pour nous en inspirer. Ayons la sagesse de nos ancêtres paysans, celle-là qui accepte de lâcher prise et de s'en remettre au cours naturel des choses et au rythme des saisons, résignée à l'idée que toute chose terrestre passe, mais confiante que toujours quelque chose lui succède. Et pour nous revigorer, voici les mots qui concluaient l'article de 1890 :
"Et si la ville s'abîmait dans quelque tremblement de terre, dans des siècles et des siècles, quand les fouilles découvriraient la nouvelle Pompéi, on retrouverait nos Auvergnats, la jambe levée, les doigts claquant au-dessus de la tête, surpris au moment d'une bourrée; car ils ont la fureur de la danse, et ils dansent à Paris comme à Saint-Flour, ignorants de nos perpétuelles agitations, aussi tranquilles et joyeux parmi la fournaise ardente de notre vie que sur les volcans éteints de leur montagne."

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